
Y-S de Patanjali . II-54 Pratyahrah.
hस्वविषयासंप्रयोगे चित्तस्य स्वरूपानुकार इवेन्द्रियाणां प्रत्याहार
Sva visaya samprayoge cittasya svarupanukara iva indriyanam Pratyaharah.
Sva: propre, soi-même .Visaya: Objet. Asamprayoge: sans contact. Cittasya : mental. Svarupa: la nature. Anukara: suivant. Iva: comme. Indriyanam : les sens. Pratyaharah: intériorité.
Une traduction “L’intériorisation se développe lorsque les sens ne sont plus mis en contact avec leurs objets et qu’ils atteignent la subtilité du mental.”
La première trace du concept de pratyahara se trouve dans les Upanisads (env 10e s. av J.C) et notamment la Chandoya- Up 8.15: “atmani sarva-indriyani sampratishthapya” ( “concentrant en lui tous les sens”).
Dans les sutras précédents (de II-35 a II-53) Patanjali suggère de pratiquer le Yoga de la manière suivante : (1) cultiver l’honnêteté, la non violence …., ce sont les cinq yamas; (2) équilibrer la croissance avec la gratitude dans notre approche de la vie , ce sont les cinq niyamas; 3 maintenir un corps à la fois fort et souple avec les asanas; et 4 pratiquer une respiration consciente , c’est le pranayama. Dans ce sutra 54, nous sommes encouragés à approfondir notre pratique et à prendre conscience du pouvoir de nos sens.

Les sens sont comme cinq organes qui sont « affamés » et qui veulent être « nourris » en continu. Lorsque les sens sont les maîtres de nos vies, nous devenons esclaves de nos expériences extérieures. « Lorsque le dessert est bon nous sommes satisfaits mais quand la musique est trop forte, nous sommes en colère ». Dans notre quotidien, nos sens sont constamment sollicités, notre société hyper consommatrice, les moyens de communication de plus en plus rapides, nous poussent constamment hors de nous-mêmes. Qui ne regarde machinalement son téléphone portable plusieurs fois par jour, par exemple!!!. Le problème avec le fait de compter entièrement sur les sens comme perception de la vie est que nous ignorons complètement une autre dimension – notre monde intérieur. De nombreuses pratiques de yoga impliquent que nous lâchions celui-ci pendant un moment afin que nous puissions rediriger notre attention, notre conscience, vers notre univers intime.

Vers l’écoute intérieure
Le yoga nous apprend comment cesser de nous identifier à nos sens et à toutes les sollicitations extérieures pour revenir à notre centre, le Soi. Pour explorer Pratyahara, on invite le pratiquant de yoga à plonger à l’intérieur de lui, en fermant les yeux, les oreilles, pour redécouvrir les perceptions intérieures (sensations du corps, respiration, émotions, pensées….) Car les sens peuvent aussi permettre d’entrer en relation avec notre univers interne, souvent délaissé au profit du monde extérieur. C’est essentiel de pouvoir sentir tout ce monde qui est en nous. En tournant les sens vers l’intérieur, la prise de conscience est améliorée et notre compréhension de la vie s’élargit. Pratyahara nous propose d’avoir un regard de simple spectateur qui regarderai le film de sa vie avec une certaine neutralité. L’énergie d’intériorisation du mental génère un accroissement de l’équilibre intérieur .Le yoga nous montre comment vivre les sens en les oubliant « activement ».Au début, rediriger les sens demande beaucoup d’efforts, mais prendre conscience de leurs pouvoirs les rend, peu à peu, moins puissants.
Mais l’idée ultime de Pratyahara est de pouvoir faire des allers-retours afin de ne plus cloisonner intérieur et extérieur. Ultimement, Pratyahara permet de mettre fin à la discrimination : monde intérieur – monde extérieur.
Pratyahara est la porte d’entrée vers la méditation, car grâce à cette pratique, on apprend à rester ouvert, attentif aux perceptions les plus subtiles. Cette écoute est non réfléchie, non sélective, on laisse venir ses perceptions sans être altérés par elles.

Expérimentez le retrait des sens au travers deTrataka.
Pratiquez le matin avant de débuter votre journée afin de rester centré et intériorisé ou bien le soir avant de vous coucher, ce qui vous permettra un sommeil calme et réparateur
« Fixez le regard, sans ciller, ni cligner des yeux,
sur un objet (une cible pour le regard comme : un point marqué sur le mur, une
flamme de bougie, une image miniature …..jusqu’a ce que les larmes roulent. »
(Hatha Yoga Pradipika).
- & L’objet doit se trouver à hauteur du regard ou légèrement en-dessous.
- & Asseyez-vous dos droit, le corps relâché, le regard fixe et détendu, sans crispation
- & Pratiquez tout d’abord l’exercice 2 minutes pour progressivement augmenter
- & Au terme de votre pratique, fermez les yeux et visualisez mentalement l’objet fixé la même durée que celle pendant laquelle vos yeux sont restés ouverts.
Au début votre mental sera traversé de pensées parasites qui vous détournerons de votre concentration mais revenez en douceur à votre objet premier. »André Van Lysebeth.
